Né en 1960 à Calais (France)
Vit et travaille à Roubaix
Né en 1960, Maurice Blaussyld demeure encore à ce jour une figure mystérieuse du paysage artistique français. Son travail exigeant, fondé sur la neutralité et le détachement, est relativement peu montré alors que sa reconnaissance critique est solidement établie, sa pratique ayant été saluée dès le début des années 1990 par les critiques Bertrand Lamarche-Vadel et Nicolas Bourriaud. Si Maurice Blaussyld a étudié aux Beaux-Arts de Paris et s’y est intéressé à la gravure, au dessin et à la peinture, c’est davantage par la fréquentation des œuvres du Louvre, du Centre Pompidou et du Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris que s’est forgée sa conviction à devenir artiste. Régulièrement exposé à la Galerie Allen (Paris), son travail a également été présenté au Musée de Rochechouart en 2012 et au Centre d’Art plastiques et visuels de Lille en 2010. Récemment, Maurice Blaussyld a été présenté dans le cadre de l’exposition Duographie à la Fondation Ricard en 2018 où ses œuvres rencontrent celles de Samuel Richardot dans leur rapport au silence. Les œuvres de Maurice Blaussyld sont présentes dans quatre collections de FRAC dont l’IAC Villeurbanne, mais également la MÉCA de Bordeaux, le FRAC Bretagne ainsi que le FRAC Île-de-France.
Énigmatiques, les œuvres de Maurice Blaussyld relèvent d’« une sorte de suspension, d’anesthésie générale du sens1 » selon Nicolas Bourriaud. Il y voit également des pièces « d’une pauvreté incandescente2 » fouillant avec lucidité
« le ventre mort de l’art3 ». Il n’est dès lors pas étonnant qu’une de ses premières œuvres, une photographie en noir et blanc sans titre de 1989, fasse acte d’expertise médico-légale en montrant une jeune fille au thorax découpé. Il reproduit à cinq reprises de 1989 à 2010 lors d’expositions l’extraction de ces images cliniques toutes issues du même livre de pratiques d’autopsies qu’on lui a offert alors qu’il avait 29 ans. Maurice Blaussyld, selon ses propres mots, fait œuvre de peintre, bien que ses sculptures, vidéos ou installations, le plus souvent innommées, ne nous invitent pas dans un premier temps à y penser. Son travail, relevant d’une forme de mystique matérialiste, propose des volumes puissamment concrets (Granit, 1998), sourds (Sans titre, 1992) mais également des œuvres sur papier modestes en apparence, presque frustes, comme ses feuilles de papier millimétré (Sans titre, 2009) ou ses textes dactylographiés sans ponctuation en forme de litanie (Sans titre de 1991 et Sans titre de 2009). Sans titre (2005-2007) est une vidéo mutique de quatorze secondes en forme d’autoportrait s’insérant dans un corpus en figurant deux autres datées de 1994-2011 (vingt-neuf secondes) et 2010 (cinq secondes). On y observe ici le visage de l’artiste dans un plan très rapproché prononçant des paroles inaudibles et disparaissant à la fin de la vidéo.
Marqué par l’aniconisme biblique, Maurice Blaussyld s’inscrit dans une contradiction latente émanant aussi bien de ses œuvres que de ses propos sur elles4. Entre construction et déconstruction, multitude et unité, absence et présence, ces dernières, rythmées par la contingence et l’erreur, font émerger un trait d’union entre philosophie et art en dépassant le cadre de la forme. Il décrit d’ailleurs son travail comme « une philosophie qui demande l’art. Je travaille une forme dont ces deux notions sont complètement indistinctes5 ». Dotée d’un pouvoir magnétique rare, c’est une image en mouvement de l’énigme que demeure l’œuvre de Blaussyld, tout autant qu’un témoignage émouvant sur sa propre incapacité à délivrer des messages, à ne jamais pétrifier le sens.
1 Nicolas Bourriaud, Artpress n° 175, “Maurice Blaussyld”, décembre 1992.
2 Ibid.
3 Ibid.
4 Exposition Duographie, entretien entre Maurice Blaussyld, Anne Baudin et Laurent Montaron.
En ligne : https://www.franceculture.fr/conferences/fondation-dentreprise-ricard/maurice-blaussyld-sentretient-avec-anne-bonnin-et-laurent-montaron
5 Ibid.