Né en 1954 à Nantes (France)
Vit et travaille à Paris
À la suite de son cursus en médecine, Philippe Bazin étudie à l’École Nationale Supérieure de la Photographie d’Arles, et se consacre, de 1985 à 1993, à la réalisation de trois grandes séries de « Faces », où apparaissent les visages de vieillards, de nouveau-nés et d’aliénés. En 1999, il a été lauréat du Prix Niépce. Plus récemment, Philippe Bazin a bénéficié de résidences et de bourses de recherche au cours desquelles il a développé un travail photographique en dialogue avec des œuvres littéraires (comme celles de Russell Banks, Annie Ernaux, etc.). De 1992 à 2014, il enseigne la photographie à l’École Supérieure d’Art et de Design de Valenciennes, puis de 2014 à 2020, à l’ENSA de Dijon. En octobre 2017, il publie l’ouvrage manifeste Pour une photographie documentaire critique aux éditions Créaphis.
Le sentiment d’homogénéité qui se dégage des séries Faces repose sur la mise en place d’un protocole photographique très précis. Muni de son appareil et d’un flash, il s’approche au plus près des corps, afin de les soustraire à leur environnement immédiat. Il trouve ainsi avec le « gros plan » le moyen d’exprimer son rapport au monde, d’aborder l’intime avec distance, sans illusion ni séduction. Ce cadrage fait apparaître chaque visage comme un microcosme singulier, dans une hyper présence et une nudité qu’aucun élément décoratif ou anecdotique ne vient troubler. Selon le même principe, il photographie des dessins de Picasso ou Les Bourgeois de Calais de Rodin, mettant ainsi en évidence les enjeux formels et esthétiques qui structurent son travail. S’il questionne les mystères du visage, Philippe Bazin ne conçoit cependant pas ses images comme des portraits, car elles échappent selon lui aux écueils propres au genre : l’émotion, la complaisance et la tentation de révéler l’intériorité du sujet photographié. En décalage avec la photographie plasticienne des années 1980, son travail s’inscrit plutôt dans une relecture des enjeux de la photographie moderniste et documentaire de figures majeures comme Eugène Atget, Auguste Sander, Walker Evans ou Diane Arbus. Des premiers visages aux vidéos et paysages de chantier plus récents, les images de Philippe Bazin traduisent un questionnement politique, qui, d’une part « ne cesse de croiser les interrogations foucaldiennes sur les multiples façons qu’a l’institution – école, armée, prison, asile – de régir, surveiller et domestiquer le corps1» et, d’autre part, redonne une visibilité à des personnes habituellement exclues du champ des représentations, proposant ainsi une expérience de l’altérité.
De juillet 2017 à janvier 2020, Philippe Bazin mène un travail de terrain en Grèce avec la philosophe Christiane Vollaire, mobilisant des réseaux de solidarité et une revendication sociale collective. Une grande partie de ce travail, associant philosophie de terrain et photographie documentaire critique a fait l’objet d’une exposition au Centre de la Photographie de Genève à l’automne 2020.
1 Dominique Baqué, Photographie plasticienne, l’extrême contemporain. Paris : Éditions du Regard, 2004, p. 209.