Né en 1924 à Boulogne-Billancourt (France) – décédé en 1994 à Paris
Dès sa plus tendre enfance, Jacques Doucet fait face à des circonstances familiales traumatisantes et c’est adolescent, au travers de poèmes et de dessins, que son esprit insubordonné se dévoile. En 1942 il se lie d’amitié avec le poète Max Jacob qui l’incite à développer et cultiver son propre langage lyrique.
À la Libération, Doucet s’initie à la peinture, avec pour inspirations Paul Klee et Joan Miró, empruntant au premier son espace et au second son graphisme. Il commence à exposer au Salon d’Automne à Paris en 1943 puis en 1944.
1947 marque un tournant dans son évolution picturale, quant à l’invention d’une forme de figuration ironique et étrange. Sans égard pour l’académisme de l’art, il associe dans ses peintures des matériaux insolites comme le goudron, le papier, le carton déchiré et autres techniques diverses.
Cette même année, il se rapproche des peintres de l’Europai Iskola1 et expose avec eux, adhère au groupe surréaliste révolutionnaire2 puis à sa dissolution intègre le mouvement Cobra3 en 1948. Cobra le séduit par la libération de la couleur et la conquête de la spontanéité. L’expérimentation et le matérialisme sont perceptibles et émaillent l’ensemble de son œuvre, laquelle démarre inlassablement par « un souvenir vague qui vient au cours de l’élaboration d’une toile4 ». À la fin et suite au mouvement Cobra, en 1951, la peinture de Doucet se détache de la dichotomie abstraction/figuration. Il conserve une certaine brutalité parfois au moyen d’un couteau, et travaille la matière la rendant toujours plus épaisse et vibrante, il racle, griffe, transforme, déconstruit et recompose perpétuellement.
La veuve Andrée Doucet évoque qu’il était « un amoureux de la matière », son univers plastique se régénère et atteint une « liberté nouvelle5 » dès 1963 lorsqu’il réalise des collages puis plus tard des « pétrifications ». Ces dernières sont agglomérées dans de la résine, intégrant des éléments de dessins, des fragments d’objets du quotidien, l’artiste va puiser jusqu’à la fin de sa vie aux sources des dessins d’enfants, des graffitis et de l’art primitif.
À partir de 1970 la recherche plastique de Doucet s’inscrit davantage dans une dimension poétique, au regard des titres qu’il attribue à chacune de ses œuvres. Jusqu’en 1994, ses peintures vont suggérer toujours plus de matérialité mais « il est uniquement question de la dynamique de la couleur, de l’activité de la forme qui peut être chargée d’une sorte de poésie qui se reflète dans le titre6 ».
1 De 1945 à 1948 : groupe d'artistes des surréalistes hongrois.
2 Groupe belge du mouvement Cobra.
3 De 1948 à 1951 : mouvement dont le nom est issu des premières lettres des villes d'origine des membres fondateurs : Copenhague Bruxelles et Amsterdam.
4 Entretien par téléphone avec Andrée Doucet, 5 avril 2018.
5 Dossier de presse de l’exposition Jacques Doucet, le CoBrA français, LAAC MBA, Dunkerque, 2010-2011.
6 Catalogue Jacques Doucet, Le Cobra français. Dunkerque : LAAC MBA ; Paris : Archibooks + Sautereau Éditeur, 2010, p. 54.