Né en 1952 à Marseille – Décédé en 1996 à Marseille (France)
Richard Baquié est une des figures les plus singulières de l’art français des cinquante dernières années. Avant de se consacrer pleinement à l’activité de sculpteur, Richard Baquié eut un parcours atypique, exerçant tour à tour les professions de soudeur, chauffeur de poids lourds, monteur de grues ou encore moniteur d’auto-école. Ce n’est qu’en 1981 qu’il décroche son diplôme à l'école des Beaux-Arts de Luminy, suivant notamment l’enseignement du sculpteur Toni Grand. Son travail a entre autres été exposé au Centre Pompidou à Paris, au Guggenheim de New York, à la Fondation Cartier, alors située à Jouy-en-Josas, ainsi qu’à la documenta 8 de Cassel.
La pratique de Richard Baquié est celle d’un bricoleur subtil ; de ses installations et assemblages d’objets et d’engins, récupérés dans les décharges de sa ville natale de Marseille, se dégage une profonde mélancolie. Entre 1980 et 1990, Richard Baquié produit la quasi-totalité de son travail, l’artiste commençant à se faire connaître aux débuts de cette décennie par une série de performances. La plus célèbre, Opération Rhinocerus (mars 1983), basée sur l’histoire d’un célèbre rhinocéros offert, au XVIe siècle, au roi du Portugal, consistait donc à faire voyager sur une embarcation un rhinocéros fait de polyester jusqu’au phare du Planier, au large de Marseille. À la suite de cela, il élabore ce qui constitue la partie la plus emblématique de son travail : des sculptures ou installations nées de l’assemblage de rebuts industriels. Cette pratique a été qualifiée par l’artiste, et non sans humour, de « sculpture de série B » ou encore de « garagisme ». Fenêtre de compartiment de train (Autrefois il prenait souvent le train pour travestir son inquiétude en lassitude, 1984), carcasses de voitures (Amore mio, 1985) ou encore hélices d’avion – autant d’objets renvoyant au mouvement, au déplacement, à la motricité – composent son vocabulaire esthétique. À ses matériaux issus de véhicules, Richard Baquié intègre des éléments extérieurs à l’objet dont les dynamiques renforcent l’interaction de l’espace et du temps : l’eau circule en continu et change d’état, les déplacements d’air occupent l’espace, les sons figurent un mouvement physique…
Les mots, au moins autant que les sculptures qu’il produit, sont chez Richard Baquié porteurs de sens et de poésie. Il y a en premier lieu les titres à la fois énigmatiques et imagés de ses œuvres mais également, plus tard, ses installations célèbres qui matérialisent le langage en se composant de phrases comme L'Aventure (1987), Nulle part est un endroit (1989) ou Le temps de rien (1991). C’est en 1991, et à l’invitation de la Biennale d’art contemporain de Lyon, que l’artiste réalise sa dernière grande installation : Sans titre. Étant donnés : 1° la chute d’eau, 2° le gaz d’éclairage…, entreprise d’une ambition rare relevant à la fois d’une « réplique » (à l’échelle 1) et du démontage de la mythique et ultime œuvre (du même titre) de Marcel Duchamp conservée au Museum of Art de Philadelphie.