Evariste Richer
Le grand horloger
2017
Sérigraphie 2 couleurs sur Arches BFK Rives blanc 300 gr., encadrée
80 x 120 cm
Tirage 15/15
Multiple réalisé en 15 exemplaires + 5 épreuves d'artiste, en janvier 2017 à l'atelier Œil de Lynx, Bagnolet, et produit par les Amis de l'Institut d'art contemporain, Villeurbanne/Rhône-Alpes.
Le grand horloger est une sérigraphie : un gros plan sur les mains d’un pêcheur fabricant un leurre. L’image source provient d’une coupure de presse du New York Times, découpée et ramenée des États-Unis par l’artiste.
Les mains à l’œuvre prennent ici une valeur quasi magique, une dimension chamanique ; la touche dorée au centre révèle le leurre en le sacralisant.
Cette sérigraphie condense un certain nombre de préoccupations qui traversent le travail d’Evariste Richer : les distorsions d’échelle, le rapport de l’infiniment petit à l’infiniment grand, les mains qui donnent et « contre-donnent », les « outils de mesure » du monde, et une interrogation à la fois inquiète et subtile sur notre compréhension de l’univers. Partant d’un événement banal et concret – un pêcheur préparant un hameçon – l’artiste nous fait glisser vers une dilatation du récit.
Le titre, « Le grand horloger », renvoie à une expression issue de la philosophie (notamment Voltaire1) et de la théologie, passée dans le vocabulaire plus courant pour désigner un être suprême qui régirait le monde et sa mécanique céleste. Au-delà de cette idée du grand marionnettiste qui jouerait avec les fils de nos destins, le titre de l’œuvre souligne l’un des signes visuels forts qui composent l’image, la montre au poignet de cet homme, chronomètre subliminal, et par là, mesurant le temps qui passe, le temps du pêcheur qui attend de ferrer l’invisible dans la patience et le silence, le temps de l’artiste qui cherche le dépassement de l’art dans sa dématérialisation, le temps de l’image qui trouble, magnétise ou menace le regard…
Sorte de Vanité contemporaine, cette œuvre se présente comme une nouvelle articulation du travail d’Evariste Richer, dans la mesure où elle amorce la réalisation à venir de plusieurs œuvres autour du leurre. Selon les propos de l’artiste, elle « appâte le futur ».
1L'univers m'embarrasse, et je ne puis songer
Que cette horloge existe et n'ait point d'horloger.
Voltaire, Les Cabales, v. 111 - 112, (cité in Lagarde & Michard, XVIIIe siècle, p. 114).