Célia Gondol
Observables d'Apeiron
2016
Soie, lurex, polyester
170 x 440 cm
Œuvre produite dans le cadre du programme des résidences d’artistes de la Fondation d’entreprise d’Hermès
Aussi éprise de cosmogonie que de cosmologie, Célia Gondol navigue entre mythologie des origines et imagerie spatiale. En 2016, elle transpose dans un somptueux tissage des images collectées sur les sites du CERN ou de la NASA. Dans les reflets bleutés, cuivrés et fluorescents du lurex, de la soie et du polyester, se répètent des motifs cosmiques : étoiles, galaxies, fonds diffus cosmologique… Partition longue de quarante mètres, cette grande traîne est aussi ponctuée de plages muettes et de plis traduisant les « angles morts » de l’univers. Le titre Observables d’Apeiron évoque d’ailleurs cette matière infinie et indéfinissable qu’Anaximandre, philosophe et astronome grec du VIe siècle av. J.-C., avait englobée sous le concept d’Apeiron : « celui qu’on ne saurait ni limiter ni définir ».
Produite lors d’une résidence effectuée au sein du Holding Textile Hermès, l’étoffe témoigne de la haute technicité du métier à tisser Jacquard. Inventé à Lyon au début du XIXe siècle et donné comme l’ancêtre des systèmes de programmation, le métier Jacquard perfectionne le raisonnement logique par-delà l’artisanat du métier à tisser primordial, qui symbolise la « matrice prolifique1 » dans de nombreux mythes de création. Le tissage accomplit ce premier geste d’ordonnance universelle, littéralement cosmique – cosmos exprimant d’abord l’idée d’une mise en ordre avant de désigner l’univers.
1 Marcel Griaule, Dieu d'eau. Entretiens avec Ogotemmêli (1948), Paris : Fayard, 1975, p. 82.