Ursula Biemann
Acoustic Ocean
2018
Vidéo couleur sonore, vidéo couleur muette, hydrophones, matériaux électroniques, câbles
Durée : 18’50’’
Dimensions variables
Caméra : Lydia Zimmermann
Performance : Sofia Jannok
Édition vidéo : 3/5
Installation complète unique
Acoustic Ocean suit les faits et gestes d'une jeune femme Sami qui tente d'entrer en communication avec les organismes sous-marins. Vêtue d'une combinaison orange ornée d'une fourrure de renne, la scientifique dispose des hydrophones sur une côte de la Norvège pour écouter le chant de l'océan. Ursula Biemann réactive la figure de la scientifique autochtone, déjà présente dans Forest Law (2014) ; riche du savoir ancestral de son peuple et équipée de matériel technologique comme une extension de ses organes sensoriels, la chercheuse se fond dans son environnement et s'immerge littéralement dans l'univers sonore du milieu aquatique. Elle est représentative de cette
« connaissance située » dont parle Donna Haraway1, investie physiquement et politiquement dans son champ d'étude, à rebours de la prétention objectiviste d'un « point de vue de nulle part ».
Au milieu des années 1950, Jacques-Yves Cousteau et Louis Malle réalisent Le Monde du silence ; l'océan est alors considéré comme un environnement hostile à conquérir et les espèces qui l'habitent font les frais du face-à-face brutal avec les scientifiques. Mais la mer est loin d'être silencieuse. Quelques années plus tôt, des recherches militaires ont mis au jour l'existence d'un canal sonore baptisé SOFAR, permettant de propager naturellement le son à de très grandes distances. Ce canal est utilisé par les rorquals pour communiquer avec des individus éloignés. « L'esprit a ses propres technologies », écrit Ursula Biemann dans son film. L'immensité de l'océan recèle une vie incroyablement riche et en grande partie inconnue, dont l'intelligence propre nous échappe toujours.
1 Donna Haraway, « Situated Knowledges: The Science Question in Feminism and the Privilege of Partial Perspective », Feminist Studies, Vol. 14, n° 3, automne 1988.