Né en 1944 à Cleveland (OHIO, États-unis)
Vit et travaille à New york (État de New York, États-Unis) et à Santa Monica (Californie, États-Unis)
Allen Ruppersberg émigre à Los Angeles pour étudier au Chouinard Art Institute (aujourd’hui CalArts), d’abord dans la section illustration publicitaire, puis dans la section artistique. Formé dans les années 60, Ruppersberg émerge comme une figure marginale de l’art conceptuel. Sa démarche se nourrit de ressources littéraires (de littérature savante aussi bien que de littérature de gare), de culture populaire (publicités, éléments provenant des mass media, cinéma), de références autobiographiques (ses lieux de vie, ses amis).
Après avoir participé aux principales manifestations de l’art conceptuel depuis les années 60, Allen Ruppersberg a ensuite mené un parcours singulier régulièrement montré dans les grandes expositions internationales (Portikus, Francfort, 1997 ; Magasin – Centre National d’Art Contemporain, Grenoble,
1996 ; Museum of Contemporary Art, Los Angeles, 1985…).
Archiviste de son propre travail, Allen Ruppersberg a présenté l’exposition One of Many – Origins and Variants à l’Institut d’art contemporain en 2006, pour laquelle a été produite l’œuvre These Fragments… 1968-2003, compilation et mise en scène de ses œuvres antérieures.
Allen Ruppersberg explore simultanément différents modes opératoires qui posent véritablement des actes inscrits dans des temporalités particulières (lire, écrire, copier, collecter, collectionner…). L’un des fondements de son œuvre réside alors dans la transposition et le recyclage de ses propres travaux, ou de leurs fragments. Les formes d’expression d’Allen Ruppersberg sont par conséquent extrêmement diversifiées : installation, performance, multiple, peinture, sculpture, dessin, livre, photographie, vidéo, etc.
Traversées par l’idée de multiplicité, ses œuvres sont hybrides et transdisciplinaires, et construisent, selon le désir de l’artiste, un « genre plus démocratique d’objet d’art ».
À la fin des années 60, Ruppersberg élabore Al’s Café (1969) et Al’s Grand Hotel (1971), des lieux que l’artiste a transformés en un « vrai » café et un « vrai » hôtel, et qu’il investit pendant un temps donné. S’ils font basculer l’art dans le réel, le café et l’hôtel de Al nourrissent aussi l’art du réel. Véritables lieux de rencontre pour la communauté artistique de Los Angeles et au-delà, il y fait la connaissance d’Allan Kaprow, initiateur du happening et fervent partisan de la réunion entre l’art et la vie.
Son œuvre de 1972 Where’s Al ? crée une rupture avec les travaux précédents. Par cet ensemble de 160 photographies (réalisées à l’appareil Instamatic) et de 110 textes (cartes d’index de bibliothèque tapées à la machine), l’artiste met en scène sa propre disparition. Des personnages de fictions (ses amis ?), tels des détectives partent à la recherche d’indices. En effet, à partir de 1972, Ruppersberg disparaît physiquement de ses œuvres.
Le livre et ses différentes déclinaisons matérielles vont par la suite sous-tendre tout le travail de Ruppersberg. Que ce soit lorsqu’il s’approprie un texte en le recopiant intégralement à la main en vingt tableaux (The Picture of Dorian Gray, 1974), qu’il l’envisage comme forme et élément de sculpture (Remainders: Novel, Sculpture, Film, 1991), comme image reproductible (série des Reading Times), ou comme un substrat mémoriel (Siste Viator, 1993).
Collectionneur, Ruppersberg a accumulé au fil du temps une quantité impressionnante de documents et d’objets de natures diverses : livres, affiches, cartes postales, films éducatifs, magazines, disques… Issus de la massification industrialisée de la production culturelle au XXe siècle, ces documents témoignent de la culture populaire américaine et participent pleinement du travail de l’artiste.
Un point de vue global sur ses archives est proposé dans The New Five Foot Shelf1 (littéralement : « l’étagère de livres de cinq pieds de long »), œuvre réalisée par Allen Ruppersberg en 2001, l’année où il quitte New York pour retourner à Los Angeles. Chaque élément de ce vaste archivage (One of Many) est soumis à un processus de recyclage et de variations (Origins and Variants). L’artiste définit lui-même cette installation comme « un grand travail biographique.
Au milieu des années 90, Ruppersberg tend à privilégier les lieux physiques comme éléments principaux de son activité artistique : certaines villes européennes donnent lieu à des œuvres in situ abordant la commémoration d’événements historiques traumatisants (Siste viator, 1993, à Arnheim,
Pays-Bas ; The Best of All Possible Worlds, 1997, à Münster, Allemagne), ou encore à des formes de réappropriation subjective de l’espace urbain.
Marqué par la Beat Generation, l’artiste privilégie dans son œuvre les relations entre vie quotidienne et création artistique, entre sphère privée et espaces publics, entre la construction de la fiction et la production du réel.
1 The Five Foot Shelf of Books est une encyclopédie publiée en 1910 par le président de l’Université de Harvard (P.F. Collier and Son, New York, collection « Harvard Classics ») comportant « 50 volumes, 418 titres, 300 auteurs, et 76000 références ». Cette édition a été très populaire aux États-Unis jusque dans les années 50, et représentait « ce qu’il faut lire » pour un américain cultivé. A contrario de cette vision normative, la « nouvelle encyclopédie » que propose Allen Ruppersberg rassemble, classe et installe, selon des modalités variables, un corpus de textes, documents et photographies de ses archives personnelles.