Née en 1979 à Ho Chi Minh-Ville (Vietnam)
vit et travaille à paris (FRANCE)
Depuis les années 2000, Thu-Van Tran a réalisé différentes expositions personnelles, en France, comme : The Book People, Bétonsalon, Paris, 2009 ;
199 491.The Pure Number according to Marguerite Duras, La maison rouge, Paris, 2010 ; The 18th Place, Villa du Parc, Annemasse, 2013 ; Écrire et autres éclats, Les Abattoirs, Toulouse, 2016... ; également à l’étranger : Exchange of presents, n.b.k.-Neuer Berliner Kunstverein, Berlin, 2016 ; A novel without a title, VCCA-Vincom Center for Contemporary Art, Hanoï, 2018 ; Novel without a title, Kunsthaus Baselland, Bâle, 2020.
Elle a également participé à de très nombreuses expositions collectives dans le monde, et ses œuvres ont intégré d’importantes collections publiques et privées.
Aux débuts des années 2000, alors qu’elle étudie à l’École des beaux-arts de Paris, Thu-Van Tran découvre à la Fonderie de Coubertin les techniques sculpturales les plus classiques. Là, elle observe avec passion chaque étape de la fonderie d’art, et médite « la part maudite » de la sculpture : l’opulence et la permanence des bronzes les plus monumentaux nécessitent toujours la liquidation de matières transitoires, la destruction de moules et de matrices, dont les formes ne persisteront, fantomatiques, qu’en négatif. Cette logique sculpturale imprègne toute la pratique de l’artiste. Tout autant que ses moulages d’hévéa réalisés en caoutchouc, ses photogrammes, ses films et ses récits révèlent toujours la mémoire d’une empreinte, d’une étreinte ou d’une emprise évanouie. Celle notamment des occupations successives qui marquèrent le Vietnam, qu’elle quitte en 1981, à l’âge de deux ans.
C’est d’abord par le biais de la littérature que Thu-Van Tran explore les récits coloniaux et les identités hybrides. En premier lieu, il y a la débâcle d’une famille française dans l’Indochine des années 1930 dans Un barrage contre le Pacifique (1950) de Marguerite Duras, son auteure fétiche. Mais aussi le racisme internalisé d’un universitaire américain, qui, dans La Tache (1998) de Philip Roth, masque ses origines noires. Ou encore, la dérive hallucinée d’un officier britannique sur un fleuve d’Afrique noire, que décrit Joseph Conrad dans Au cœur des ténèbres (1899). En 2013, Thu-Van Tran en tire une traduction française subjective, dont les quelques pages qu’elle expose au mur s’abîment dans un noir total, indéchiffrable (Au plus profond du noir). Cette traduction pirate défait toute autorité linguistique, et dans une logique de guérilla, la langue devient une prise de guerre. Dans une performance des débuts intitulée La jaune qui parle (2003), Thu-Van Tran avait d’ailleurs conquis l’espace par la parole, interrogeant le pouvoir double du langage, générateur d’appartenance autant que d’appropriation.