Diplômée en arts plastiques de l’Université de Berkeley (Californie), Shirin Neshat est une vidéaste et photographe iranienne. Les institutions les plus reconnues dans le monde de l’art lui consacrent des expositions personnelles, par exemple la Tate Gallery à Londres en 1998, le Guggenheim Museum à Bilbao en 2002, le Stedelijk Museum à Amsterdam en 2006, le Mathaf Arab Museum of Modern Art à Doha en 2014.
Shirin Neshat quitte l’Iran en 1974 pour étudier aux États-Unis et retourne dans son pays seize ans plus tard, après la mort du shah Khomeini. Elle débute sa carrière par des portraits d’individus et de groupes. Les photographies de l’artiste ne se réduisent pas à des composantes visuelles dans la mesure où elle a toujours pris soin d’y insérer l’écriture. Outre les changements politiques, religieux et culturels, qui ne sont pas sans incidence sur l’inspiration de l’artiste, ses influences sont autant la littérature (Mniru Rovani ou Forough Farrokhzad) que le cinéma (Kiarostami) ou la musique (Gugush). Ainsi, au-delà de toute représentation sociale ou politique, les œuvres de Shirin Neshat recèlent une dimension poétique que l’artiste commente de la manière suivante : « c’est un thème fondamentalement iranien. La terreur et la violence peuvent être annihilées par une véritable explosion d’inspiration poétique ».
Une forme récurrente des photographies de Shirin Neshat est l’autoportrait. Dans les années 90, elle entame une série où elle se met en scène, portant le tchador : seules les parties de son corps (yeux, mains, pieds) que la loi islamique autorise à montrer sont visibles, tandis que le reste est alors recouvert de calligraphies farsi (ou persan moderne). Cette réflexion se poursuit en 1994 avec sa série, Women of Allah, dans laquelle l’artiste apparaît parfois elle-même voilée et armée. En 1997, Shirin Neshat abandonne la photographie pour la vidéo, ce qui lui permet de multiplier les images, d’offrir une plus grande densité de la mise en scène et d’utiliser le son et la musique, en particulier le chant iranien.
La condition de la femme dans la société iranienne, le fondamentalisme, le féminisme, l’identité culturelle et la religion sont autant de sujets que Shirin Neshat aborde dans son œuvre. Il s’agit de détourner les préjugés, de réinterpréter les clichés et de choisir de poser des questions plutôt que de chercher à orienter des réponses.
Shirin Neshat obtient le lion d’argent de la mise en scène pour son long métrage Women Without Men lors de la 66e Mostra de Venise en 2009. Fidèle à ses sujets de prédilection, l’artiste dresse dans son film le portrait de quatre femmes, prises dans la tourmente d’un coup d’état iranien en 1953, qui se réfugient dans un verger, symbole de leur indépendance et de leur amitié. L’artiste affirme qu’elle cherche à « montrer la complexité de notre culture aux occidentaux, mais uniquement de manière conceptuelle, sans forcément chercher à montrer la réalité ».