NÉE EN 1935 À CHAMALIÈRES (FRANCE)
Décédée en 1981 à Paris
Formée aux arts appliqués à l'École Duperré, puis aux Beaux-Arts de Paris, Claude Batho débute la photographie lorsque son père lui offre son premier appareil. Au milieu des années 50, elle travaille comme photographe chargée de la reproduction aux Archives nationales ; elle rencontre à cette époque son futur mari John Batho, lui aussi photographe. En parallèle, elle élabore un travail en noir et blanc plus personnel ayant pour cadre sa vie domestique et familiale, et qui sera révélé à partir de 1977 avec la parution du livre Le Moment des choses. Sa carrière naissante s'interrompt avec son décès brutal en 1981. Outre de nombreuses publications, son travail a fait l'objet d'une exposition au musée Nicéphore Niépce en 2014.
La force de la photographie de Claude Batho réside dans son éclatante simplicité ; en se resserrant autour d'un nœud intime, elle va du singulier à l'universel et transforme le banal et le répétitif en moments uniques, hors du temps. L'enfance, le foyer, le paysage : les motifs, traités à l'argentique noir et blanc, sont des plus classiques mais prennent sous l’objectif de Claude Batho une dimension nouvelle. Sans artifice ni mise en scène, la lumière naturelle se pose en demi-jour sur les compositions du quotidien, révélant d'infimes variations de matière. L’œil s'attarde au détail : brillance du cuivre ou de l'inox (Le coin de la cuisine, 1970), transparence du verre, granulé de l'éponge sur la faïence mate d'une baignoire (L’éponge neuve, 1980), jeux d'ombres, lourdeur du linge froissé (Le linge mouillé, 1982) ou plissé des rideaux... Avec ses photographies, Claude Batho crée une dialectique entre l'extérieur – les éléments, les saisons, les heures – et l'intérieur – les choses, les gens.
Le calme qui émane de ces images est parfois troublé d'un certain malaise, comme dans la photographie Le bain (1980) ou par ce Rideau de douche (1981) enveloppant un corps d'enfant comme le voile translucide d'un fantôme sans visage. De même, dans les images de Claude Batho, l'ombre est rassurante, mais c'est la lumière qui est porteuse d'inquiétude et le signe d'un manque : le reflet d'une fenêtre par exemple, qui masque La photo du père (1977). Ou cette balançoire suspendue dans l'image, dont l'assise, vide, réverbère un pur parallélogramme de lumière.
Le travail de Claude Batho est une invention perpétuelle du quotidien. Selon John Batho, elle « définit son territoire avec une constance remarquable. Elle garde le blanc et le noir et pratique la photo comme elle écrirait un journal. C’est un peu son carnet de croquis. Elle montre que certains objets sont porteurs de la vie et témoins de l’existence parce qu’ils s’identifient à ceux qui s’en servent1 ».
1 In : Claude Batho, photographe. Présenté par John Batho et Françoise Marquet, préface de Sylviane Hefter, éd. des femmes, 1982.