Né en 1939 à Dresde (Allemagne)
décédé en 2017 à Zurich (Suisse)
Ralf Winkler vit ses premières années dans une Allemagne en guerre où l’ordre et la hiérarchie militaire scandent le rythme d’une vie quotidienne tournée vers l’effort de guerre. À la fin de la guerre, la maison familiale est touchée par les bombardements alliés, « ces événements [furent] les plus marquants et les plus importants de sa jeunesse. […] On a vécu cela ou on ne l’a pas vécu1 ». Selon Bernard Marcadé, « Ce n’est pas [par] maniérisme biographique ou psychanalytique » qu’il revendique ces événements comme les plus importants de sa vie ; « l’œuvre de Penck est traversée de part en part (minée) par cette fissure originaire2 ».
La carrière internationale d’A. R. Penck commence avec son expatriation de la RDA en 1980, même si les collectionneurs s’intéressent déjà à ses œuvres dans les années 1970. En 1988, il devient professeur à l’Académie des Beaux-Arts de Düsseldorf, où il enseigne la peinture jusqu’en 2003.
Au moment du décès de l’artiste en mai 2017, la Fondation Maeght,à Saint-Paul-de-Vence, présente l’exposition A. R. Penck. Rites de passage.
A.R. Penck (pseudonyme le plus connu de Ralf Winkler) débute la peinture vers l’âge de dix ans. Pendant son adolescence, il côtoie des peintres et sculpteurs de Dresde avec qui il étudie et s’ouvre à la culture. À seize ans, il suit un apprentissage de dessinateur publicitaire qu’il abandonne rapidement. L’année suivante, il rencontre Georg Baselitz et tente les concours d’entrée des académies des Beaux-Arts de Dresde et de Berlin, sans succès. Un artiste autodidacte donc, qui s’est toujours entouré de personnalités avec lesquelles il échange et étudie.
Des années 1960 au début des années 1980, il se lance dans une tentative de systématiser sa production artistique. Nourri par les théories de l’information et de la cybernétique, très en vogue dès la fin des années 1950, il imagine des procédés et méthodes qui puissent rendre ses tableaux lisibles et compréhensibles par le plus grand nombre, dans l’utopie d’un langage universel. Ses tableaux se déclinent en différents ensembles intitulés Weltbild [tableau-monde], Systembilder [tableaux-systèmes] ou Standart.
En 1980, il est contraint de quitter l’Allemagne de l’Est pour s’installer à l’Ouest. Dans le même temps, les premières expositions consacrées à son travail ont lieu en France (CAPC de Bordeaux, 1980 et Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, 1981). Bien que Penck ait été associé au « nouvel expressionnisme allemand » avec d’autres artistes comme Georg Baselitz, Markus Lüpertz ou Jörg Immendorff, son œuvre semble pourtant résister à cette catégorisation. Toute son œuvre est traversée par le paradoxe d’une « lisibilité illisible » ; comme si les figures et les signes composant ses tableaux et sculptures mettaient en jeu l’impossibilité de la pratique artistique à faire système ou plus simplement, l’impossibilité de la peinture à dire le monde et ses absurdités.
1 Interview de Johannes Gachnang, 1975. Cité dans le catalogue A. R. Penck, Berlin Zurich, p. 10.
2 Bernard Marcadé dans A. R. Penck, Paris : Éditions de La Différence, 1992 (Les Classiques au XXIe siècle).