Né Edward James Muggeridge en 1830 à londres (Angleterre) - décédé en 1904 à londres
Né dans la banlieue de Londres, la vie d’Eadweard Muybridge est marquée par des déplacements constants entre son pays d’origine et les États-Unis où il se rend pour la première fois à l’âge de 22 ans. Alors libraire et éditeur, il est victime en 1860 d’un grave accident de diligence qui l’amène à rentrer en Angleterre. Pendant sept années de convalescence, il apprend la photographie et se passionne pour ce médium au point de se procurer le meilleur matériel possible pour sa pratique. Une fois diplômé, il s’installe en 1867 à San Francisco où il crée un studio de photographie itinérant.
Il travaille aussi dès 1870 pour l’entreprise Bradley et Rulofson connue pour ses vues stéréoscopiques. Inventé en 1838 par un membre de la Société Royale de Londres, le principe de la stéréoscopie permet la réalisation d’images en relief (à partir de deux images planes en se basant sur le principe de la vision binoculaire) grâce à un dispositif à miroirs. En 1844, le procédé est appliqué à la photographie (née en 1839) : des appareils à deux objectifs sont ainsi créés en série et popularisés notamment par la Reine Victoria elle-même. Eadweard Muybridge profite de l’âge d’or de la technique (1851-1880) pour faire connaître son travail et ses clichés rencontrent rapidement un certain succès.
Par ailleurs, il réalise de nombreux portraits de personnalités californiennes et devient photographe-paysagiste pour le Coast and Geodetic Survey. Il est récompensé en 1867 pour avoir documenté la guerre indienne des Modocs au Nord-Est de la Californie et photographié le parc de Yosemite (Sierra Nevada). Il est alors engagé par l’armée américaine pour témoigner de l’occupation des terres en Alaska. Il entreprend de 1868 à 1873 une exploration de tout le Far West, puis est de nouveau remarqué en 1877 pour son panorama à 360 degrés de la ville de San Francisco.
Cependant, Eadweard Muybridge est surtout entré dans l’histoire comme le premier photographe à être parvenu à « arrêter l’action », à capter et décomposer le mouvement. C’est au cours des années 1870 qu’il cherche à répondre à une demande de l’un de ses clients, Leland Stanford, magnat du chemin de fer et passionné de chevaux de course, qui s’interroge au sujet d’une polémique née en France en 1872. Le physiologiste Etienne-Jules Marey, pionnier de la photographie, affirme en effet que les pattes d’un cheval au galop décollent du sol. Afin de prouver cette théorie, Eadweard Muybridge installe douze appareils photographiques le long d’une piste équestre qu’il a, au préalable, blanchie (pour favoriser le contraste). En déclenchant à distance par un système de fils les appareils, le photographe est parvenu à réaliser les fameux clichés qui l’ont rendu célèbre, tout en confirmant les propos de Marey. Par la suite, il perfectionne ce système de développement de photographie instantanée basé sur une grande vitesse d’obturation électronique et électro-minutée.
L’année suivante, en 1879, il invente un dispositif de projection spécifique, le « zoopraxiscope », qui recompose le mouvement par la vision rapide et successive d’images imprimées ou dessinées sur un disque qui tourne. Avec cet appareil, Eadweard Muybridge parcourt l’Europe et les États-Unis et participe à de nombreuses manifestations dont l’Exposition Universelle de Chicago (1893).
La contribution d’Eadweard Muybridge à l’histoire des sciences et des arts est considérable. Si le photographe souhaitait employer son médium avant tout comme un témoignage scientifique, son travail a aussi intéressé et inspiré de nombreux artistes (Auguste Rodin, Edgar Degas, etc.).
Par ailleurs, l’invention du « zoopraxiscope » est considérée comme une avancée primordiale pour l’invention du cinéma. C’est en effet cet appareil qui donna l’idée à Thomas Edison et William Dickson du « kinétoscope », premier projecteur de consultation individuelle d’images animées accompagnées par le son d’un phonographe (1888).
Eadweard Muybridge est ainsi devenu l’un des symboles d’un XIXe siècle foisonnant, croyant au progrès et aux innovations scientifiques. Il a contribué au développement de la photographie, à l’émergence de l’industrie cinématographique et a été le témoin et le passeur de son temps. Sa carrière traduit un contexte économique et politique particulier aux États-Unis : la croissance du capitalisme, la consolidation de la fierté nationale, le développement du commerce international et des moyens de transports, l’expansion du territoire américain et les idéaux de la politique démocratique.