Né en 1955 à Colombes (Hauts-de-Seine)
Vit et travaille à Paris
Alain Séchas expose ses œuvres depuis 1984 ; il a représenté la France à la Biennale de São Paulo en 1996. Les disciplines qu’il pratique sont diverses – dessin, peinture, vidéo, sculpture… – et s’inscrivent dans une démarche qui vise à saisir le réel dans l’instantanéité de ses mouvements, afin de lui faire subir un travail de déréalisation et de simplification aboutissant à une expression immédiatement reconnaissable.
De nombreuses expositions personnelles lui ont été consacrées, notamment au Mamco en 2002 (Trivial Pursuit) et en 2009 (Marouflette), au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris en 2016) (Coup de vent), au Musée de l’Abbaye Sainte-Croix des Sables d’Olonne en 2018 (Passe-temps).
Cherchant à déconcerter, à faire agir et réagir le spectateur, Alain Séchas questionne le rôle de l’art et la manière dont il peut prendre place dans la vie. Une de ses œuvres les plus emblématiques est Le Mannequin (1985). À la fois figure rhétorique et gag visuel, l'œuvre propose une remise en question de la sculpture : il s’agit d’un mannequin renversé, en complet veston, les bras ballants, la tête prise dans une cuvette contenant du béton. L’homme, capturé par son propre socle, semble vouloir s’en extraire en gesticulant. Le Mannequin fait écho, en négatif, à une autre œuvre de Séchas, La Grosse Tête (1986). Cette fois-ci c’est le corps qui est pris dans un socle en plexiglas transparent, d’où émerge, comme un champignon en train de pousser, une gigantesque tête, lisse et immaculée. Par un procédé d'inversion, Alain Séchas questionne ainsi le socle de la sculpture traditionnelle tout en oscillant, sur le fond, entre le dérisoire, le burlesque et le tragique.
Dans ses dessins comme dans ses sculptures des années 1990, l’artiste fait intervenir de manière récurrente des figures anthropomorphes : les chats sont les plus connus, mais on trouve aussi des martiens, des pieuvres, des fantômes… Ces personnages jouent des scènes grotesques déployant une idée du monde assez sombre où l’humour grinçant n’est bien souvent que la face risible du négatif. L’artiste dresse un panorama de nos peurs et de nos frustrations : suicides absurdes (une seule balle atteint plusieurs personnes en décrivant une courbe improbable), viols, décapitations et pertes de divers membres, fleurs carnivores tirant un char romain, os jaune muni de pattes, Hitler en bébé-chat reproduit à l’infini par un jeu de miroirs (Enfants gâtés, 1997). Il explore également les relations d’autorité, comme la relation père-fils où la figure paternelle est toujours ramenée à un simple portrait, tantôt sévère (Le Chat écrivain, 1996), tantôt mortel (Les Papas, 1995). Ou bien le rapport élève-professeur, dont l’apprentissage se révèle désastreux (Professeur Suicide, 1995). Le spectateur se retrouve ainsi pris en défaut : tout comme l’élève ou l’enfant, fasciné par une image autoritaire, il doit toujours s’interroger sur ce qu’il regarde.
« Le travail d’Alain Séchas, par la rigueur qu’il introduit dans sa fuite hors des figures imposées de l’esthétique contemporaine, nous replonge violemment dans la recherche anxieuse de critères susceptibles de définir notre intérêt pour des images souvent grotesques, apparemment bâclées, absurdes et violemment déraisonnantes. Son univers se donne comme la charnière des deux visions de l’art, point-limite entre formalisme et excentricité, théorie et anecdote1 ».
Depuis 2008, l’artiste a laissé les grandes installations multimédias pour se tourner vers la peinture, où il continue à décliner la figure du chat anthropomorphe dans des scènes de vie ordinaires, humoristiques et très stylisées, parfois jusqu’à l’abstraction.
1 Nicolas Bourriaud, La Disjonction du visible, texte écrit pour le catalogue de l’exposition Alain Séchas à l’Hôtel des Arts, Paris, 1992.